Glauque

Publié le par Isabelle à Paris

Ça faisait longtemps, n'est-ce pas ?

 

Je suis dehors et j'écris au soleil. Il fait un temps superbe. Les cerisiers du parc à côté de chez moi sont en fleurs. De loin, on dirait de gros nuages teintés de rose. Je ne sais pas si ce sont des cerisiers. Mais je trouve ça joli. Il faut quand même avoir la force de trouver de jolies choses. Ici, on ne parle que des enfants tués à Toulouse, de crimes haineux et racistes. Le monde moderne vire à la barbarie et coule doucement dans le glauque. Il faut préserver l'âme intacte. On trouve ce qu'on peut et on fait avec.

 

La semaine dernière, j'ai été voir une exposition sur l'oeuvre de Tim Burton. Un extrait d'interview m'a marquée : «Je ne sais pas bien dessiner, je ne sais pas faire de beau visage ni de beau paysage. Par contre, le dessin est pour moi un besoin. Un jour, je me suis dit que j'aimais dessiner et c'est tout ce qui importait. Cela m'a enlevé un poids énorme». L'exposition détaille beaucoup de ces dessins, de l'enfance jusqu'à ces derniers films. Il aime conjuguer l'horreur avec l'enfance, la science-fiction avec la réalité, la pureté de l'individu avec la société froide et dure. Il s'est démarqué par des films animés en «stop-motion» et des longs métrages mettant en scène des personnages éclectiques et dérangeants, mais jamais malveillants. Tim Burton a su faire du beau avec du laid, du ravissant avec du médiocre. Et je crois que c'est l'art ultime : savoir sublimer ce qui paraît repoussant, étrange et glauque.

 

Malgré les tueries, les meurtres, les assassinats, les guerres et les soulèvements, les politiques machiavéliques, le pouvoir oppressant et l'abrutissement des mauvaises télé-réalités, nous nous en sommes toujours sortis. Pas nécessasirement indemnes, mais nous nous en sommes sortis vivants et l'humain respire encore sur cette terre. Malgré des milliers d'années d'hostilité et de haine entre nous, nous avons bâti des sociétés. Pas nécessairement des sociétés justes, mais des sociétés quand même. Nous nous sommes regroupés entre nous. Nous avons établi contact. Ce simple geste, ce minuscule contact avec l'autre offre un espoir. Peut-être que cet espoir est futile et se transforme souvent en «nous» contre «eux», et non pas en «nous» avec «eux». C'est à ce moment-là que la responsabilité de chacun entre en jeu : attraper l'espoir au vol et choisir de sublimer l'hostilité, la haine, le glauque en quelque chose de mieux. Nous sommes tous des artistes dans l'âme.  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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